Au coeur de l’Eje Cafetero

Une odeur délicieuse de café moulu, des champs de cafeyers partout où porte mon regard, un coucher de soleil flamboyant…. et 15 jours où les 3 mots – transmission, partage et confiance – ont pris tout leur sens. Bienvenue dans l’Eje Cafetero!!

Manizales, ville colombienne de taille moyenne, se mérite. Elle s’étend sur plusieurs collines qu’il nous faut gravir en empruntant de très grands axes. Nous sommes accueillis comme des amis par Leo et Angee (réseau warmshower). Tous deux sont férus de sports et de vélo. Leur dynamisme, leur générosité et leur gentillesse rendront notre séjour des plus agréables. Nous rejoignons en bus Chypre, le quartier panoramique de la ville. Les faubourgs populaires côtoient les champs de café qui font la renommée de la ville. Le Nevado Ruiz ne nous fera pas l’honneur de se découvrir mais nous apprécions la balade jusqu’à la cathédrale, unique et particulière en son genre. Construite entre 1928 et 1939, c’est une œuvre de béton armée ornée de vitraux multicolores contrastant avec l’obscurité des murs. Nous nous lançons à l’assaut du clocher quand l’orage éclate. Entre la hauteur, les trombes d’eau et la foudre, c’est impressionnant. Au sommet, la ville s’offre à nous dans sa version monochromatique.


Le soir, Leo et Angee nous invitent à une tournée gastronomique dans leur quartier. Découverte de la banane plantain cuite au four avec fromage et bocadillo de goyave dans un petit resto, accompagnées de mazorcas ou maïs grillé. Puis on se dirige vers le trottoir d’en face: un petit stand, une marmite, une friteuse et de délicieuses empanadas. Double tournée avant de terminer par une bonne glace. Super soirée entre rires et partages.

Vendredi 24 Mars: Manon fête ses 14 ans. On profite tranquillement du confort d’une maison avant de s’offrir un bon déjeuner et une séance ciné Pop Corn. Ce soir, c’est soirée crêpes salées et sucrées et gâteau au chocolat. Manon est radieuse et très entourée pour cette soirée spéciale. Nous sommes heureux de la voir ainsi épanouie à l’aube de sa vie de jeune adulte ! Merci Leo et Angee d’avoir partagé ces moments avec nous.

L’itinéraire choisi nous amène au cœur des quartiers populaires. Les maisons sont construites en briques rouges. Si la façade est propre et bien finie, les murs latéraux sont souvent bruts et les toits en fibrociment. Les voir d’en haut ou d’en face changent donc totalement notre vision des choses! Les fils électriques s’entremêlent au dessus de nos têtes.

Une piste nous mène hors de l’agglomération vers la finca de Marcella. Nous l’avons rencontrée pendant la visite de la cathédrale et elle nous a invités à déjeuner. Elle est aux petits soins avec nous et nous gâte de gourmandises et de bons cafés. Nous repartons en fin d’après-midi sous la pluie, équipés de nos vêtements de pluie hautement techniques:  des ponchos en sacs plastiques achetés à Murillo, qui nous font ressembler à des spationautes comme tous les motards que nous croisons!!

La brume se lève doucement, transpercée de quelques rayons de soleil. Ils illuminent un paysage énigmatique de côteaux de cafés et de bananiers, creusés de vallées de bambous géants, les guaduals. Une explosion de verts! Des cascades de feuilles de toute forme et de toute taille! Des crêtes sombres qui se dessinent dans la lumière du soir quand nous arrivons dans le petit village de Llanitos! Nous sommes seuls ce soir dans le petit hôtel de Zeinada l’amie de Marcella. Nous mettons rapidement le réchaud en route avec une bonne soupe de légumes. Nous sommes très fiers car allechés par l’odeur, Zeinada et son mari, les propriétaires, souhaitent goûter notre préparation. Nous partageons donc nos repas et des grandes discussions sur la politique française, la situation sociale actuelle et celle de Colombie.

Nous trouvons les Colombiens très au fait de la situation française et aussi très curieux d’en apprendre davantage. La plupart des enfants savent situer notre pays et connaissent tous sa capitale et sa célèbre tour Eiffel. Nous avons également le sentiment que les Colombiens sont fiers de leur pays. Certains ne souhaitent vivre nulle part ailleurs car ils ont tout ici, la gastronomie, que nous apprécions chaque jour un peu plus, la nature, les paysages et l’humanité de son peuple. Ils sont sensibles à notre vision de leur pays et à celle qu’en ont les français en général, à la fois conscients et tristes de l’image violente qui demeure, et qui correspond de moins en moins à la réalité d’aujourd’hui. D’ailleurs, quand l’un d’entre eux nous met trop en garde sur la sécurité, ses amis s’énervent souvent en rétorquant que tous les Colombiens ne sont pas des voleurs, des assassins ou des narcotrafiquants. Et que ce n’est pas pire qu’ailleurs. Bien sûr nous restons dans des zones sûres et tranquilles pour nous mais qui le semblent aussi pour les Colombiens eux mêmes. Ce n’est sûrement pas le cas partout mais nous découvrons un peuple apaisé tourné vers le futur, avide de tourisme et de découverte de leur pays. Et surtout des familles et des couples inspirants qui prennent des risques pour réaliser leur rêve et vivre la vie qu’ils veulent. Une belle leçon d’humilité et une bouffée d’ondes positives!

La route se poursuit à flanc de collines toujours aussi abruptes, et auxquelles sont amarrées des maisons en guaduals tels des voiliers en perdition. Une goutte de trop et on s’attendrait presque à les voir dévaler la montagne. Ces pentes nous interrogent quant à la façon de récolter le café. Tout à la main et avec des harnais apprendrons-nous plus tard!!! Le tout pour produire l’un des meilleurs arabicas du monde. Nous sommes admiratifs.


Nous rencontrons chaque jour de nombreux cyclistes, qui nous interpellent, nous questionnent voire nous reconnaissent après la course partagée sur le volcan.
Ce matin-là, nous croiserons à trois reprises 2 d’entre eux et Jorge insiste pour nous inviter à prendre un tinto à Chinchina, capitale du café instantané dont les effluves flottent sur la ville.

On parle itinéraire et ils nous conduisent aux portes de l’autoroute. Nous n’avons pas trop le choix pour rejoindre Santa Rosa de Cabal car la piste alternative est coupée par un éboulement. Alors on respire un grand coup, enfin surtout des gaz d’échappements bien noirs, et on essaie d’avaler ces kilomètres peu agréables le plus vite possible avant d’assouvir notre faim grandissante à Santa Rosa. Dès notre arrivée sur la place, on nous pose mille questions. Nous sommes dimanche et comme toujours les Colombiens aiment vivre dehors en famille et entre amis. Nous restons deux nuits pour profiter des bains chauds si célèbres de cette municipalité, dont on nous parle depuis Cartagene. Nous y voilà !! Une vallée verdoyante qui débouche sur une cascade dont les eaux coiffent d’un voile immaculé les roches volcaniques. Nous l’admirons depuis les piscines fumantes. Même la pluie est rafraîchissante juste ce qu’il faut dans ces conditions. On se ramollit doucement! Deux nuits au même endroit nous permettent aussi de nous sentir comme à la maison avec nos petites habitudes, comme prendre le petit déjeuner (huevos pericos) dans la même boulangerie parmi les travailleurs colombiens ou déguster des mazorcas (maïs) grillés le soir sur la place. Alors qu’on charge les vélos, un vendeur ambulant clame : « lait frais, lait frais ». On n’y prête pas vraiment attention, de plus en plus habitués aux vendeurs de rue. Mais en levant la tête, je tombe nez à nez avec deux chèvres: le lait vient directement de leur pis!! La Colombie nous surprendra toujours !!

Nous prenons le route de Pereira dont la traversée est bien difficile. Heureusement, nous prenons de la hauteur pour rejoindre nos amis Leo, Catalina et leur fils Miguel. Nous les avons rencontrés il y a 3 mois à Rincon del Mar et ils nous ont généreusement invités chez eux. Leo est professeur à l’université et Catalina tient un café sur la colline de Altagracia. Le lieu est unique, simple et chaleureux, accueillant et intimiste, tout à fait à l’image de Leo et Catalina. Nous nous y sentons si bien. La vue est aussi époustouflante qu’apaisante, et on y sert l’un des meilleurs cafés du coin, provenant de leur propre production – on ne peut pas faire circuit plus court. Car ici, nous découvrons une vraie culture du café et retrouvons le plaisir de déguster un espresso sans sucre aux arômes subtils et complexes.

Nous passerons 10 jours avec Catalina, Leo et Miguel. 10 jours aussi intenses que reposants, qui vont sceller notre amitié et qu’il va être difficile de résumer ici tant nous avons vécu pleinement ces moments de vie quotidienne partagés. Nous nous entendons tout de suite très bien avec eux. Nous partageons le même sens de la famille, le même plaisir pour les jeux, les balades et les échanges autour d’un bon repas. Ils ont à cœur de nous faire découvrir leur région et leur passion.


La visite de leur plantation de café nous en apprend encore un peu plus sur cette culture qui se rapproche de celle de la vigne avec l’importance des sols, de l’exposition et de l’altitude, la façon de le récolter, de le servir et de le goûter pour découvrir toutes ses subtilités. Il y a d’ailleurs des sommeliers de café! Des premières fragances du café moulu aux arômes de la boisson, nous apprenons à le doser et à le déguster… tel un bon vin!

Grâce à Catalina, nous visitons egalement l’atelier de fabrication de solteritas du village. Encore un bel exemple d’entrepreunariat réussi avec une dimension sociale qui plus est. Tout a débuté dans la cuisine d’Angela, qui a peu à peu modernisé la fabrication de ses galettes croustillantes et frites à la forme inspirée des pâtisseries arabes. Elles la doivent à un moule d’acier brûlant trempé dans un premier temps dans une pâte à base de farine de blé et ensuite dans un bain d’huile. La galette ainsi préparée se déguste avec une purée de carotte sucrée. Un délice!!! L’entreprise emploie 8 personnes de la communauté ou des étudiants dans le besoin.


Entre un cours de yoga, une baignade dans un petit coin de paradis et la gestion de son café, Catalina trouve encore le temps de nous concocter d’excellents repas: arepas maison, bunuelos, soupe de haricots rouges locales, bananes plantains frites. Nous leur faisons découvrir à notre tour quelques classiques de notre gastronomie: ratatouille, mousse au chocolat, boeuf bourguignon, gratin dauphinois, lasagnes et même du fromage que l’on trouve au grand supermarché de Pereira.


Vendredi en nous réveillant, nous avons un peu le trac!!! Aujourd’hui, nous intervenons dans un cours de sociologie du sport de Leo, à l’Université Technologique de Pereira. Cette dernière accueille 20000 étudiants sur un campus très agréable et doté de belles installations. Devant une vingtaine d’étudiants très réceptifs, nous expliquons notre périple, nos motivations, les moments forts comme les rencontres telles que celle que nous vivons. Ils sont curieux aussi du côté éducatif et de notre vision de la Colombie. Moment d’échange privilégié pendant lequel je me régale de retrouver le contact avec les jeunes.

Le lundi, jour de fermeture du café, nous prenons la route d’un petit coin perdu qui leur est cher: la Florida, petit village au fond de la vallée de l’Otún, sauvage et authentique. Les maisons sont décorées de magnifiques fresques. Portes, fenêtres et sous pente sont rehaussées de couleurs vives: jaune, rouge, bleu, vert à l’image de la Colombie. Pique nique, ricochet château de sable et bain de pieds, recette de l’après midi idéale au bord de la rivière tumultueuse.


Catalina offre à Manon l’opportunité de travailler dans son café. De la confection des gâteaux à la décoration des assiettes en passant par le service, Manon découvre ce métier et s’y sent dans son élément!!

Il y aurait encore tant à dire…. mais l’heure est venue de continuer notre route. Nous quittons nos amis le cœur bien serré, mais emplis d’amitié, de souvernirs communs et d’énergie positive qu’ils nous ont transmise pendant ce séjour incroyable. Merci pour tout, tout simplement!!

Pendant que nous coulons des jours heureux avec nos amis, le volcan Nevado Ruiz se réveille doucement. Nous passons en alerte orange. Les routes que nous avons empruntées la semaine précédente sont fermées, certains villages évacués. Les fumerolles se font plus nombreuses. Nous restons vigilants et à l’écoute des actualités locales!!

18 commentaires sur “Au coeur de l’Eje Cafetero

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  1. Une belle vision de la Colombie…
    Encore merci pour ce récit, accompagné de magnifiques photos, où j’ai humé l’odeur du bon café 🙂

  2. formidable de retrouver des familles , rien n’est plus beau que de créer du lien, merci Fanny de partager vos rencontres et vos découvertes, quelle superbe école pour les filles
    Bise

    1. C’est ce que l’on préfère, ce lien, que l’on crée au fil des kilomètres, grâce à une confiance mutuelle! Et en effet une belle école d’humilité pour les filles et aussi pour les adultes!

  3. Quelle belle page de ce voyage profitez bien. Nous sommes en Équateur et dimanche au Galápagos. Amitiés Françoise Guy

    1. Merci Françoise et Guy. Nous sommes contents que vous profitiez de l’Equateur et des îles, notre prochaine destination dans quelques semaines. On vous embrasse.

  4. Vous nous régalez avec vos descriptions, vos photos ,vidéos.
    BrBravo ,vous nous régalez avec vos descriptions vos photos , c.est magnifique

  5. Stage de découverte 3ieme, en avance Manon et , validé , je me doute par Catalina.
    Des rencontres toujours aussi spontanées et généreuses . Merci à tous vos amis colombiens
    On vous embrasse bien fort.

    1. Exactement. Un stage 3 étoiles qui l’a enchantée grâce à l’accompagnement tout en confiance et en bienveillance de Catalina. Bises

  6. Passionnant. Rencontre exceptionnelle. Et du café à l’arôme des lamas futés…ça c’est fort 🤨

  7. Super Rico les lamas ! On se régale de vos aventures ! Allez en selle Marcel ! C est marrant la dernière photo avec l horloge en frein à disque et les 5 lamas futés dans la tasse de café ! Bisous . Nous on part 5 jours dans la Death Valley pour vivre dans un autre temps ! Bisous

    1. Bonnes vacances dans la Death Valley! Et les petits lamas futés sont l’œuvre de Damien et Manon, petit souvenir pour nos amis liant l’histoire de nos deux familles !! Bises

  8. What an amazing family I just meet, I wish you guys the best, an a nice road thanks for sharing your trip 🫶🏻🫶🏻

    1. Léo vient de nous lire ce magnifique récit, face au lac Atitlan. Nous sommes très heureux de vous lire et de partager votre aventure grâce aux mots et aux photos. Quelle chance, ces rencontres vraies et sincères.
      Les enfants ne peuvent s’empêcher de compter vos jours de « pause » et restent vigilants pour qu’on ne s’éloigne pas trop du score !!
      Bisous à vous.

      1. Vous pouvez rajouter 4 jours au compteur les enfants dont un qui compte double au parc d’attraction du Cafe !!! Continuez à profiter comme vous le faites du Guatemala!! Plein de bisous

    2. Muchas gracias Andres! Y gracias por sus fotos de nuestra familia y nuestro viaje!! Son muy lindas!! Que le vaya bien!

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par Anders Noren.

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