Rio blanco

Après avoir quitté le camping de Elly et Werner, nous revenons sur nos traces pendant 25 km jusqu’à Cunco. C’est une route étroite et passante, mais sous le soleil, de belles surprises nous attendent…

Sur notre droite, nous découvrons pour la première fois le cône parfait du volcan Villarica. Il est imposant et concurrence le volcan Llaima, que nous admirons à notre gauche. Et c’est ainsi que nous parcourons ces kilomètres, entourés de majestueux volcans et de prairies verdoyantes.

Malgré la montée, les kilomètres défilent et nous arrivons à Cunco vers 14h30, heure idéale pour déjeuner au restaurant, cadeau d’anniversaire de Fanny. Alors que nous rejoignons la Plaza de Armas, un papa et sa fille, qui font un tour de manège, nous saluent et nous interrogent sur notre voyage. Ils continuent leur tour et nous, notre recherche de déjeuner. Quelques minutes plus tard, ils reviennent vers nous. Andy nous explique qu’il est aussi cyclo-voyageur et il nous invite chez lui. Nous les suivons tout de suite avec plaisir! Matilde, juchée sur ses épaules, a le même âge qu’Héloïse et un sourire tout aussi malicieux. Andy nous ouvre sa maison, et repart faire quelques courses. Il ne nous connaît que depuis quelques minutes, mais quelle confiance et quelle générosité! Damien et Manon partent à la recherche de victuailles, et nous profitons du confort de la maison. Pendant que les quatre filles jouent dans le parc voisin dans un mélange de gestes, d’espagnol et de français, nous discutons à bâtons rompus avec Andy. C’est une personne au grand cœur, très ouverte, passionnée d’horticulture et de lecture. Les plantes vertes qu’il cultive avec attention, les livres de littérature internationale, la chaleur du poêle, tout créé ici une atmosphère apaisante et chaleureuse. Il nous explique que sa maison est petite mais que son cœur est grand, et nous laisse même sa chambre pour la nuit. Nous passons une excellente soirée autour d’un repas français que nous lui avons cuisiné pour le remercier: ratatouille, camembert et crumble aux pommes! Il nous fait découvrir les pignons des auracarias. Un délice! Merci Andy pour ta bonté et ton accueil si spontané! Ton sourire et tes conseils nous accompagneront sur la route.

Encore grandis par cette rencontre, nous repartons dimanche vers le lac Collico, sous un ciel qui se voile peu à peu. Les sacoches sont pleines à craquer, avec des vivres pour 4 ou 5 jours. Nous ne savons pas trop si nous trouverons des commerces avant Curarrehue. Nous nous engageons le long des rives du lac pour trouver un petit coin à pique-nique. Une petite plage de galets fera l’affaire. En saison, elle doit être aménagée. Mais quand commence vraiment la saison estivale? Car, il y a du travail d’ici là, pour tout remettre en état!

La piste de gravier monte en pente douce. Au dessus de nous, des falaises abruptes nous surplombent et aux grondements que nous percevons, nous devinons la présence de cascades impressionnantes. Quand la végétation se découvre, nous avons la chance de les admirer… avant que les nuages ne les cachent à nouveau. Les rives du lac sont inaccessibles, car les dieux « Barbelés » ont a encore frappé. Les filles ont même inventé un nouveau verbe: « les agriculteurs barbèlent leurs champs… ». Nous arrivons en bout de lac, avant une grosse montée vers 18h00. Aucun coin à bivouac repéré, seul un camping au prix prohibitif mais il commence à pleuvoir et vue l’heure, nous capitulons. Ce camping de luxe a une particularité: chaque site possède sa propre salle de bains. Comme le fait remarquer Manon, pour nous, cela ne change rien car comme on est toujours tout seul, nous profitons toujours de sanitaires privés!! Le lieu dispose aussi d’une grande salle à manger où nous dînerons au sec et nous profiterons du baby foot pour une belle partie de rigolade en famille.

Nuit sous la pluie rime avec réveil tardif. Nous profitons d’une éclaircie pour faire sécher la tente et alors que nous enlevons les premières sardines, une pluie diluvienne s’abat sur nous… Elle était presque sèche…Tant pis, nous la roulerons trempée. Il faut bien se mettre en route. La brume joue à cache cache avec les montagnes à la végétation luxuriante, créant une atmosphère parfois inquiétante.

Chaque nuage déverse sur nous son trop-plein d’eau… On ne parle plus de gouttelettes!! Heureusement, nous sommes bien équipés de vestes hi-tech aux membranes à la fois imperméables et respirantes, un vrai progrès technique par rapport aux anciens K-way, et bla bla bla et bla bla bla… Du pipo tout ça! Gore-tex ou K-way, même constat: après quelques tours de roue en montée, nous dégoulinons de l’intérieur et avons l’impression de revivre le sketch de Danny Boon. Seule Héloïse, habillée pourtant de la tête aux pieds de simples K-way, est toute sèche à l’intérieur. Quand nous lui demandons son secret, ses yeux malins écarquillés, elle nous chuchote à l’oreille: « c’est facile, c’est parce que moi, je ne pédale pas….!! »

Il est 15h quand nous avalons un pique-nique sous la pluie, debout sur le bord de la route, lors d’un arrêt imposé. Damien a déraillé, sa chaîne s’est coincée dans l’essieu. Il faut démonter la roue… Pffff!! Heureusement, la végétation est de toute beauté: mélange inextricable de fougères géantes, de bambous et de pins à certains endroits, puis forêt calme et apaisante aux arbres centenaires à d’autres. Aucune pollution ni visuelle, ni sonore. Nous nous laissons gagner par la sérénité des lieux et nous accrochons à l’idée que demain, le soleil sera de retour.

Nous rejoignons un camping au bord de l’immense lac Caburgua, fermé, mais nous insistons auprès du propriétaire et il nous laisse y camper pour la nuit. La pluie cesse, quelques rayons de soleil illuminent les berges voisines. Après le baby foot d’hier, ce soir, c’est concours de ricochets! Nous cuisinons notre repas préféré, chili con carne sans carne avant de nous réchauffer sous la tente.

Au petit matin, le spectacle est grandiose: la brume se dissipe, le volcan Villarrica se dresse au dessus des eaux calmes du lac… Waouhhh!!! Nous prenons le temps d’admirer cette nature si sauvage, nous nous enivrons de ces paysages de montagnes, qui appellent à la méditation!

Les filles profitent de la plage, Manon se fabrique une canne à pêche…

Mais il nous faut repartir. Nous longeons le lac sous la surveillance du volcan. Lors d’une halte entre deux montagnes russes, Fanny s’aperçoit qu’elle a perdu la culotte d’Héloïse qui séchait sur le tandem! Déjà qu’on n’en a pas beaucoup!! Elle part à pied sur quelques kilomètres – étape trop facile, il fallait rajouter un peu de sport – pour la retrouver et profite au retour de la seule voiture qui passera dans la journée.

Nous trouvons de magnifiques bivouacs en bord de rivière, mais quand Fanny propose de s’y arrêter, c’est une mutinerie (très à la mode au Chili en ce moment!). Les filles s’écrient toutes en même temps: » On a dit qu’on allait aux Thermes ce soir, alors on va aux thermes!! ». C’est vrai que la motivation principale des derniers jours sont les thermes de Rio Blanco que la famille Envourchons nous a conseillés. Alors, nous continuons la montée, enchaînons les montagnes russes, les pentes sont raides. Nous poussons les vélos à tour de rôle. Une fois encore, les filles sont très positives dans l’effort. Elles s’inventent des pouvoirs magiques pour se donner de la force. Les fées ont dû oublier les parents, qui trouvent les vélos bien lourds. Mais peu à peu, ils sont gagnés eux aussi par la magie de l’enfance et les quatre derniers kilomètres sont avalés à un bon rythme grâce à la force familiale.

Nous parvenons aux Thermes dans l’après midi, véritable petit paradis champêtre. Le camping de Patricio et de sa famille est tellement agréable et eux si accueillants: une belle pelouse au bord de 2 bassins naturels à deux températures différentes. Nous nous y laissons fondre sous le soleil, puis sous le ciel étoilé. Entre les deux, nous nous ravitaillons auprès de la maman de Patricio: œufs frais de ses poules, blettes du jardin, petits pains maison. De quoi améliorer nettement notre quotidien, de pâtes et de riz.

Nous restons une nuit de plus. Notre journée sera rythmée par les bains chauds, dès le réveil! Ecole et balades nous occuperont aussi. Nous trouvons les champignons poussant sur les arbres qu’Andy nous a vantés, les « diguene ». Ils sont ronds et oranges. Il faut lancer un caillou ou une branche pour les faire tomber. Pas facile, mais, nous arrivons à en cueillir quelques uns de sains. Ils se mangent crus, mais seule Fanny se lancera (après vérification auprès de Patricio): un petit goût de noisette pas désagréable, qui doit en effet bien se marier avec de la coriandre!

Nous rencontrons aussi un couple fort sympathique, Patricia et Ignacio, en voyage vers la Patagonie pendant plusieurs mois. Le matin de notre départ, ils nous offrent un vrai café… Mmhhh!! Un régal! Nous discutons voyage. Ils nous invitent chez eux à Vina del Mar quand nous le voulons. Peut être nous recroiserons nous un peu plus au sud ou en Argentine!

Le départ des Thermes est difficile. Héloïse ne veut pas quitter ces lieux et nous le fera bien comprendre toute la journée! Même programme que l’avant veille: pentes très raides et renforcement des biscottos!!! Enfin, la route s’aplanit et nous profitons d’une montée plus douce, avec en toile de fond des pics acérés et enneigés.

En crête, les auracarias millénaires ressemblent à des spectateurs commentant notre étrange caravane familiale. En choisissant ces pistes reculées et non goudronnées, nous retrouvons les mêmes sensations qu’en randonnée: une plongée au cœur de la nature, que nous vivons avec tous nos sens et à travers l’effort que cela nous demande. Nous sommes vraiment heureux de notre choix de locomotion et d’itinéraire (bon… une fois que la pente raide est terminée bien sûr!!!). Après le col, nous bivouaquons en bord de rivière, qui nous offre un décrassage bienvenu. L’endroit est déjà aménagé pour un bon feu. Demain, c’est de la descente qui nous attend.

Enfin de la descente, façon de parler! On commence la journée en poussant les vélos. Nous retrouvons encore et encore, les montagnes russes de la côte pacifique!! Le soleil tape fort. Quelle amplitude thermique! 1 degré au réveil, 35 degrés à midi. La vallée s’élargit, des maisons sont disséminées tout le long de la rivière. Beaucoup de collèges aussi, neufs et modernes alors que la région est faiblement peuplée. Nous sommes en territoire Mapuche. Le gouvernement semble beaucoup développer ces infrastructures ici. Dans quel but? Louable nous espérons… Nous ne connaissons pas assez la politique locale pour tout comprendre. La piste devient passante et très poussiéreuse. Le coin qu’on nous a indiqué pour bivouaquer ne nous tente pas. Sur la rive opposée, nous décelons une belle étendue herbeuse. Fanny part en éclaireur. Evidemment, le champ est barbelé. Mais, elle finit par trouver la propriétaire, Iria, qui donne son aval avec plaisir. De moyen, le bivouac devient donc super, au milieu des moutons, sur un lit de mousse argentée, en bord de rivière, qui nous sert de cuisine, de salles de bain et de terrain de jeu.

Nous profitons des lieux une bonne partie de la journée suivante, toujours accompagnés d’un soleil radieux et d’une chaleur accablante. Dire qu’il y a quelques jours, on grelottait! On cherche l’ombre, on se rafraîchit dans l’eau, on fait sécher les duvets, qui souffre de l’humidité nocturne.

Et on retrouve la piste et sa poussière jusqu’à Curarrehue. Nous arrivons tardivement en ville, et nous y posons pour deux nuits, dans de vrais lits. Un petit luxe qui fait du bien au dos des parents! Nous devons aussi décider de la suite de l’itinéraire pour les semaines à venir, en fonction des ouvertures des parcs retardées par la neige encore bien présente.

16 commentaires sur “Rio blanco

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  1. Bonjour les Lamas !!! Quelle belle histoire ! Je vous lis comme un récit de voyageurs que vous êtes et je me dis que pour réussir une si belle odyssée, le secret est d’avoir trois petites sirènes embarquées !!!
    Plein d’ondes positives du Mont Ventoux

  2. Hello,

    C est du high Level, j hésite même à laisser un commentaire qui va sûrement faire baisser le niveau. Désolé. Je ne sais pas vous mais, pour ma part, j’ai relu Rio blanco plusieurs fois; je regarde les photos une par une pour les détails et je me dis « Quelle belle semaine pour vous » ! de mon canap, j ai tout aimé : La vue du volcan villaricca au petit dej ,la photo de famille dans les thermes , les moments de repos autour du feu, les filles en train de pousser le tandem ( ok Damien tu as une excuses tu prends les photos et toi t as eu une panne mécanique :-), leurs phrases , la réflexion sur les étanchéités de kway, vos choix de campement avec barbelés ou pas. Bref c est comme si on y était, quoi ! Pour l instant, j ai l impression que vous avez fait les bons choix guidés par vos envies mais aussi par les rencontres ( et donc votre envie de faire une ratatouille/crumble)…les ingrédients d une chouette aventure. Je vous souhaite de profiter maintenant d un peu plus de chaleur pour « sécher » et LET’S GO LES LAMAS!

  3. Merci Fanny pour le récit de cet épisode entre ces beaux volcans, et bravo à Héloïse pour son secret
    anti-ruissellement.
    Très heureux pour vous de vos rencontres de gens adorables!!
    Félicitations aux 5 lamas futés de la part de Denise et Jean

  4. Quelles aventures! Je retiens trois expressions « la rencontre nous fait grandir » , « s’inventer des pouvoirs magiques pour se donner de la force » et les « agriculteurs barbellent leurs champs » , c’est toujours aussi plaisant, instructif et vitalisant de vous lire!

    1. Merci Jean Luc !!! Tes commentaires me font toujours très plaisir !!! Les mots des enfants sont souvent justes. Ils ont des ressources et une imagination qui nous surprennent toujours. A très bientôt.

  5. Encore et toujours des sourires !!!
    Encore et toujours de chaleureuses rencontres .
    Encore et toujours des fabuleux paysages.
    On ne s’en lasse pas
    Bisous

    1. Coucou, bisous de nous 5 !
      merci pour les encouragements, qui nous font passer avec le sourire les petites côtes que nous réservent toujours les pistes chiliennes.

  6. Les photos et les textes nous font vraiment ressentir la beauté et la grandeur des lieux que vous traversez ! On a même l’impression que c’est facile, vu d’ici… Quelle aventure en famille ! Keep going well guys ! On vous envoie plein d’energie pour poursuivre ce beau périple, ca nous en donne de vous lire.

  7. Felicidades
    Qué bueno que hasta aquí todo le haya salido bien
    Confiemos a Dios para que los acompañe
    Un abrazo
    Saludos

  8. Merci pour ces beaux partages ! J’aime beaucoup votre blog, textes et images très vivants ! J’ai vraiment du mal à me réadapter après notre année dans les Andes et vous me permettez de continuer un peu à avoir la tête dans le guidon… Profitez bien de ces moments riches en expériences !

    1. Salut François, et bonjour à toute la troupe lesandesentandems ! J’imagine que le retour après une aventure comme la votre (ou la notre) peut, à l’image des Andes, présenter des hauts et des bas. Bon courage, et encore merci pour tes messages et vos précieux conseils. A bientôt

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par Anders Noren.

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